A propos de la Croix-Rouge Anarchiste …

Reprise d’un article paru sur le site de la CICR :

Reprise d’un article « clin d’oeil » paru sur le site de la CICR

Et la Croix-Rouge Anarchiste dans tout ça ?

13/09/2023, Clin d’oeil / Histoire
Frédéric Joli

Parmi les curiosités de la longue histoire de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge – 160 ans si on prend pour référence la création du CICR en 1863 –  celle de la société de secours anarchiste est l’une des plus belles perles.

L’origine de la « Croix-Rouge Anarchiste » demeure obscure mais ses quelques vingt années d’existence ne font aucun doute. Elle serait née entre 1905 et 1907 à l’initiative d’activistes libertaires. Certains parlent du Prince Pierre Kropotkine (1842-1921) lui-même, d’autres de la socialiste révolutionnaire, Vera Figner, d’autres encore du Prince Warlaam Tcherkesoff.

Améliorer le sort des détenus politique dans la Russie tsariste

On l’a dit avoir été créée à Londres, ou à New York, à moins que ce ne fut à Moscou. Une chose est sûre, la « Croix-Rouge Anarchiste » oeuvra de 1907 à 1918 en opposition à la Croix-Rouge Russe à laquelle il était reproché de ne rien faire en faveur des conditions de (sur)vie des détenus libertaires (malgré des dons conséquents adressés par de nombreux militants). Par volonté politique, les prisonniers anarchistes mais aussi socialistes révolutionnaires étaient exclus de tout secours. En Sibérie, dans le terrible centre d’internement d’Artvinsky, être condamné aux travaux forcés équivalait le plus souvent à la peine de mort.

L’ARC renaît aux Etats-Unis…

Après la révolution d’octobre 1917 et l’accession au pouvoir des bolchéviques, la « Croix-Rouge Anarchiste » décide de s’auto dissoudre, considérant la page des persécutions contre les prisonniers libertaires enfin tournée… Mais très vite la répression reprend pire que sous le régime tsariste.

Ainsi, la « Croix-Rouge Anarchiste » réapparait en 1924, aux États unis, avec cet appel : « To the Workers of America : Save Your Brothers Tortured in the Prisons of Russia / Aux travailleurs américains : sauvez vos frères torturés dans les prisons russes »…

… puis se transforme en ABC

Anarchist Black Cross

C’est à cette époque et pour ne pas être confondue avec « la Croix-Rouge internationale » (ce qui soulagea bien le CICR !) et peut-être aussi afin de rompre avec la couleur du socialisme conquérant que la Croix-Rouge Anarchiste se fit noire et choisit pour acronyme, ABC – Anarchist Black Cross.

On entend encore le « Ouf » de soulagement des sociétés nationales de Croix-Rouge et de Croix-Rouge. Pour mémoire, chacune est née de la volonté de son Etat et demeure auxilliaire des pouvoirs publics.

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Note du Site makhno.home.blog :

En complément de cet article, en fait la Croix Noir Anarchiste a été créé en 1920 à Kharhov, par Olga Taratuta, à la demande de Mahkno, le chef de l’Armée Insurrectionnelle Ukrainienne, de tendance anarchiste et dont l’emblème était le drapeau noir. ceci explique certainement le changement de couleur de l’emblème, pour ne pas être confondu avec le rouge des bolchéviques.

Le but de cette organisation est d’aider les détenus politiques du mouvement qui sont de plus en plus nombreux dans les geôles bolcheviques. En novembre 1920 Olga Taratuta est officiellement nommée représentante des Mahknovistes à Kharkov et à Moscou. Lourde responsabilité car ceux-ci ne sont pas en odeur de sainteté dans les allées du pouvoir ! Tout le monde sait que l’alliance conclue entre les frères ennemis, n’a que peu de valeur et sera de courte durée : peu nombreux sont ceux qui sont assez naïfs pour croire à la bonne parole des Bolchevistes, d’autant que, même pendant la période de soi-disant alliance, les arrestations continuent notamment parmi les anarchistes qui militent dans les syndicats et les Soviets.

La trahison des Communistes ne tarde pas effectivement. Une vague de répression sans précédent s’abat sur les Mahknovistes. La Croix Noire est dissoute ; Olga Taratuta est arrêtée. En janvier 1921 elle est transférée à Moscou. Elle fait partie des militants qui sont libérés quelques heures, le temps d’assister aux obsèques de Pierre Kropotkine, avant de retrouver leur cellule.

Par ailleurs, quand dans l’exil une nouvelle organisation de solidarité fut reconstituée par des militants d’origine russe (et notamment Boris Yelensky ), il fut décidé de reprendre le nom d’Anarchist Black Cross, en mémoire de la structure créée en son temps par Olga Taratuta.

Pour en savoir plus sur Olga Taratuta :

Des prisons tsaristes à celles des bolchevistes… Le destin d’une militante anarchiste russe : Olga Taratuta

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Nous étions cinq

Boris Elenski

Cela s’est produit à l’époque de notre jeunesse, lorsque la croyance dans les nobles idéaux de notre cause était forte et que la volonté de se sacrifier pour elle était toujours présente. Nous nous sommes rencontrés au cours de cette période significative et belle, tous les cinq, camarades du Mouvement, et avons maintenu pendant de nombreuses années un lien étroit et intime.

Je suis arrivé à Chicago depuis Philadelphie au cours de l’hiver 1913. La principale activité de notre Mouvement, à l’époque, était la Croix-Rouge anarchiste.

Deux événements organisés par la Croix-Rouge, le Bal des Prisonniers et le Bal des Paysans, faisaient généralement sortir toute la communauté radicale de Chicago.

Bessie et moi nous sommes impliqués dans le travail de la Croix-Rouge anarchiste. Au cours de nos activités, nous avons fait la connaissance de trois camarades qui sont restés nos chers amis pour la vie.

Nous nous sommes retrouvés tous les cinq, sans nous avoir discuté préalablement, impliqués dans le même type de travail ou siégeant dans les mêmes comités. En peu de temps, nous sommes devenus un « quintette » inséparable.

Notre étroite amitié a duré jusqu’à la Révolution Russe de 1917, quand certains d’entre nous ont décidé d’y aller [pour y participer]. Durant cette période chaotique et turbulente, nous avons perdu contact les uns avec les autres.

C’est ainsi que je me souviens des quatre qui ne sont plus parmi nous :

SAM SHULMAN était un compagnon chaleureusement réactif ; calme, très intelligent, un sourire amical et adorable illuminant toujours son visage. Il n’est pas allé en Russie avec nous. Il s’est retiré de toutes les activités pendant les raids de Palmer [entre 1919 et 1920[1]] et a disparu de la vue. Mes nombreuses tentatives pour le retrouver se sont soldées par un échec. Des années plus tard, il aurait été aperçu en Californie.

SAM (SAMKE) FRIEDMAN. De petite taille, ouvrier tailleur en vêtement, il ne pouvait tolérer une erreur. Lorsque Sam découvrait une erreur, la personne qui l’avait commise avait de la chance si elle réussissait à échapper à sa colère. En dehors de cela et d’autres petites excentricités qu’il possédait, Sam était un bon ami. Il y a peu de personnes comme lui, nous chérissions beaucoup son amitié.

Son dévouement au Mouvement était sans limite et il exigeait des autres qu’ils se donnent dans la même mesure.

Samke Friedman est parti en Russie avec le premier groupe [d’ouvriers russes] de Chicago. Pendant une courte période, il fut dans l’armée de Makhno. Un jour, après une grande et sanglante bataille avec les Blancs, le quartier général de Makhno fut contraint de déménager dans une autre ville. L’évacuation terminée, il ne restait plus qu’un petit détachement de l’armée de Makhno à l’arrière. Bien que la ville abandonnée ne soit plus sûre, Samke y retourna pour s’assurer que rien de valeur n’avait été laissé derrière lui. Son intuition s’est avérée juste. Dans l’un des bureaux de l’ancien quartier général, il trouva deux grandes enveloppes. Il fourra les objets dans ses poches et partit. Plus tard, une fois ouvertes, les enveloppes se sont révélées contenir une partie amoindrie du trésor de l’armée [insurrectionnelle d’Ukraine].

Plus tard, il vécut à Odessa, où il épousa Dora, une compagne anarchiste. En 1923, ils réussirent à quitter la Russie bolchevique. Je les ai rencontrés à Constantinople, en Turquie, par hasard. De là, ils se rendirent à Paris et devinrent actifs dans le groupe juif.

Nous sommes restés en contact, par correspondance. Finalement, une fille leur est née. Mais leur bonheur familial fut de courte durée. La Seconde Guerre mondiale ammena avec elle les assassins allemands qui arrêtèrent Samke et Dora. L’enfant de cinq ans a été caché par des compagnons français.

Alors qu’on les conduisait à la mort, Samke griffonna un petit mot qui nous était adressé. Il l’a jetée hors du train scellé qui les emmenait au camp d’extermination, suppliant celui qui trouverait cette note de nous la transmettre.

Finalement, la note nous est parvenue. C’était très bref. «Nous sommes emmenés», pouvait-on lire. « Nous ne savons pas où. Prends soin de notre enfant.

C’était la dernière fois que nous entendions parler de Samke.

BARNEY MILLSON était un jeune rempli de joie de vivre. Toujours plein d’entrain, il a en même temps abordé le travail dans notre Mouvement avec une attitude sérieuse et sobre. Il était toujours désireux et disponible pour travailler pour notre cause. Bien qu’il soit toujours enroué, Barney était un bon orateur. Il était le président du « comité de billetterie » [en charge de l’organisation des deux grands bals annuels]. Cependant, le Bal des Paysans n’impliquait pas trop de travail. Cet évènement était si populaire que certaines personnes ont été refoulées à la porte. Mais le Bal des Condamnés était une autre affaire, qui demandait beaucoup de travail au contraire. Deux mois avant l’évènement, les comités commençaient à visiter les organisations [ouvrières] pour à les inciter à acheter des billets.

Barney rendit visite aux LandmanShaftn[2], aux es organisations de femmes et à d’autres groupes pour les intéresser au bal, demandant à pouvoir intervenir dans leurs assemblées Souvent, ces organisations n’accordaient pas à Barney le droit de s’adresser à leurs membres. Mais Barney n’abandonnait pas facilement. Dès qu’il commençait à parler et à décrire la vie des prisonniers politiques en Russie, presque aucun œil ne restait sec dans la salle. Barney ne quittait jamais une réunion les mains vides. C’était un maître agitateur.

Happer par les informations provenant de Révolution de 1917, Barney partit pour la Russie avec l’un des premiers groupes. J’ai gardé le contact avec la plupart des camarades partis en Russie. Mais personne ne savait où Barney avait disparu entre 1917 et 1921. Un jour, alors que je me rendais de Moscou à Kharkov, je suis tombé sur Barney à la gare de Koursk. Notre escale a duré une heure et cela nous a donné l’occasion de discuter. Il me raconta brièvement ses expériences. Quelque temps après son arrivée en Russie, il fut en proie à la maladie. Plus tard, il étudia la médecine à l’Université de Koursk. La fille qu’il a épousée, une compagne, étudiait aussi l’université.

Vers la fin des années vingt, nous avons appris la tragique nouvelle que Barney Millson était mort après une longue maladie.

MOISHE GUTTFRIND.

Du genre silencieux, il était membre de la Croix-Rouge anarchiste. Je l’ai connu intimement au sein d’Alarm, un groupe international. Bientôt, Guttfrind rejoignit notre petit cercle.

Il avait très hâte d’aller en Russie soviétique, mais pour une raison personnelle très importante, il ne put y aller et resta en Amérique.

Je n’ai plus revu Moishe avant les années trente et dans des circonstances totalement différentes. Le noble rêve autrefois si tendrement nourri était en cendres et notre fervent espoir d’un monde nouveau à notre époque avait reçu un coup d’arrêt sévère. Nous nous sommes rencontrés pratiquement chaque année et pendant toute cette période de déceptions et de retraites bouleversantes, la foi de Moishe ne faiblissait pas. Au contraire, lorsque je l’ai quitté en 1917, il était influencé par des idées pacifistes, mais dans les années trente, il avait l’air d’un fougueux révolutionnaire. Il appartenait à ce petit groupe du Mouvement toujours « mécontent » ; cela transparaît dans ses entretiens, ses rapports et ses lettres à notre presse.

Je me demande pourquoi Moishe ne s’est pas élevé plus haut dans notre Mouvement ; il possédait certainement les aptitudes et les talents nécessaires.

C’est qu’il faut mettre au crédit de Moishe ce qui, dans notre Mouvement, était considéré comme une réalisation exceptionnelle ; il a élevé ses enfants dans l’esprit de ses propres convictions.

À l’époque où l’organisation de jeunesse « Vanguard » était active à New York, j’ai assisté à l’une de leurs réunions. Ensuite, une fille avec un joli sourire s’est approchée de moi et s’est présentée comme étant Audrey Guttfrind, la fille de Moishe. Plusieurs années plus tard, Audrey et David arrivèrent à Chicago pour organiser un groupe de jeunes anarchistes. Nous étions cinq. Sam Shulman a disparu, Barney Millson est mort, Samke Friedman et sa femme ont été victimes de la barbarie allemande. Le prochain à partir fut Moishe Guttfrind. Il en reste un qui brandira aussi longtemps qu’il le pourra la bannière qui a réuni ensemble les cinq.


[1] Les Palmer Raids désignent les tentatives menées par le département de la Justice des États-Unis pour arrêter et expulser des militants communistes et des activistes anarchistes américains. Lesdites tentatives se déroulèrent sous le ministère de Alexander Mitchell Palmer, procureur général des États-Unis. Les raids et les arrestations eurent lieu entre novembre 1919 et janvier 1920 dans un contexte de Peur rouge et d’attentats anarchistes. Plus de 500 citoyens étrangers ont ainsi été expulsés, y compris une forte proportion d’importants dirigeants de gauche.

[2] landsmanshaft provient du yiddish et désigne une société de secours mutuel formée par des immigrants juifs d’Europe centrale

Extrait de : Freedom, 24 février 1968 (vol.29, no.6)

We were five

Boris Yelensky

It happened in the days of our youth, when belief in the lofty ideals of our cause was strong and the will to sacrifice for it was ever-present. We met during that meaningful and lovely period, all five of us comrades in the Movement, and for many years afterward maintained a close and intimate bond.

I came to Chicago from Philadelphia in the winter of 1913. The chief activity of our Movement, at the time, was the anarchist Red Cross.

Two affairs given by the Red Cross, the Prisoners Ball and Peasants Ball, usually brought out the whole radical colony of Chicago.

Bessie and I became involved in the work of the anarchist Red Cross. During the course of our activities, we made the acquaintance of three comrades who remained our dear friends for life.

All five of us, without prior agreement, usually found ourselves involved in the same kind of work or serving on the same committees. Before long, we became the inseparable ‘quintet’.

Our close friendship endured until the Russian Revolution in 1917, when some of us went there. During this chaotic and turbulent period we lost contact with one another.

This is how I remember the four who are no longer with us:

SAM SHULMAN was a warmly responsive comrade; quiet, very intelligent, a friendly, lovable smile always brightening his face. He did not go to Russia with us. He withdrew from all activities during the Palmer Raids and dropped out of sight. My many attempts to find him ended in failure. Years later, he was said to have been seen in California.

SAM (SAMKE) FRIEDMAN. Short in stature, a clothing worker, he could not tolerate a wrong. When Sam discovered a wrong, the person committing it was fortunate if he escaped his ire. Aside from this and other little eccentricities he possessed, Sam was a good friend. There are few like him. We prized his friendship dearly.

His devotion to the Movement was boundless and he demanded of others that they give of themselves in the same measure.

Samke Friedman left for Russia with the first Chicago group. For a short time he was with Makhno’s army. Once, after a big and bloody battle with the Whites, Makhno’s headquarters was forced to move to another city. The evacuation completed, there remained only a small detachment of Makhno’s army in the rear. Although the abandoned city was no longer safe, Samke returned to it, to make certain nothing of value had been left behind. His intuition proved right. In one of the desks, at former headquarters, he found two large envelopes. He stuffed the objects in his pockets and left. Later, when opened, the envelopes were found to contain part of the army’s dwindling treasury.

Later, he lived in Odessa, where he married Dora, a comrade. In 1923 they succeeded in leaving Bolshevik Russia. I met them in Constantinople, Turkey, by accident. From there, they went to Paris and became active in the Jewish group.

We kept in touch, through correspondence. Eventually a daughter was born to them. But their family bliss was short-lived. The Second World War brought with it the German assassins who arrested Samke and Dora. The five-year-old child was hidden by French comrades.

As they were being led to their death, Samke scribbled a little note, addressed to us. He pleaded with the finder to forward the note and hurled it out of the sealed train that was taking them to the extermination camp.

Eventually the note reached us. It was very brief. ‘We are being taken away,’ it read. ‘We do not know where. Take care of our child.’

This was the last we heard of Samke.

BARNEY MILLSON was a youth filled with the joy of life. Always in buoyant spirits, he at the same time approached the work in our Movement with earnest and sober mien. He was always eager and available to do work for our cause. Although perennially hoarse, Barney was a good speaker. He was the chairman of the ticket committee. The Peasants Ball did not entail too much work. This affair was so popular, some people were turned away at the door. But the Convicts Ball was another matter; this one required a lot of work. Two months before the affair, the committees began visiting organizations, urging them to buy tickets.

Barney visited landsmanshaftn, women’s organizations and other groups to interest them in the Ball. Frequently the right to address those assembled was not granted; but Barney did not give up easily. As soon as he began to talk and depict the life of the political prisoners in Russia, there was scarcely a dry eye in the hall. Barney never left a meeting empty-handed. He was a master agitator.

Caught up by the news of the revolution, Barney left for Russia with one of the early groups. I maintained contact with most of the comrades who went to Russia. But nobody knew where Barney disappeared between 1917 and 1921. On my way from Moscow to Kharkov one day, I ran into Barney at the Kursk railroad station. Our stopover lasted an hour and this gave us the opportunity to talk. He told me a little about his experiences. For some time after his arrival in Russia, he was plagued by illness. Later, he studied medicine at the Kursk University. The girl he married, a comrade, also studied at the university.
Toward the end of the twenties we received the tragic news that Barney Millson had died after a long illness.

MOISHE GUTTFRIND. The silent type, he was a member of the anarchist Red Cross. I became intimately acquainted with him in ‘Alarm’, an international group. Soon Guttfrind joined our small circle.
He was very eager to go to Soviet Russia but for a very important personal reason could not go and stayed behind in America.

I did not meet Moishe again until the thirties and under entirely different circumstances. The noble dream once so tenderly nurtured lay in ashes and our fervent hope for a new world in our time had been dealt a severe blow. We met virtually every year and during all that time of shattering disappointments and retreats, Moishe’s faith did not waver. On the contrary, when I left him in 1917, he was influenced by pacifist notions, but in the thirties he sounded the fiery revolutionary. He belonged to that small group in the Movement that was always ‘dissatisfied’; this was apparent in his talks, reports and letters to our press.

It puzzles me why Moishe did not rise higher in our Movement; he certainly possessed the necessary aptitudes and talents.

Moishe is entitled to credit to his account what in our Movement was considered an outstanding achievement; he reared his children in the spirit of his own convictions.

During the period when the youth organization, ‘Vanguard’, was active in New York, I attended one of their meetings. Afterward, a girl with a lovely smile approached me and introduced herself as Audrey Guttfrind, Moishe’s daughter. Several years later, Audrey and David arrived in Chicago to organize a young anarchist group.

We were five. Sam Shulman disappeared, Barney Millson died, Samke Friedman and his wife fell victim to German barbarism. Next to depart was Moishe Guttfrind. One has remained who will hold aloft so long as he can the banner that brought the five together.

From: Freedom 24 February 1968 (vol.29, no.6)

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